Dans cette 23e interview d’expert du Web, j’accueille un graphiste passionné par WordPress et spécialiste Divi (co-gérant de Divi-Community.fr) : Pierre Bichet.
Vivant à Besançon avec sa femme (graphiste elle aussi) et ses deux petites filles, Pierre va nous livrer comment il allie ses activités numériques et l’éducation de ses enfants.

Nicolas Laruelle, Mister WP

Bienvenue Pierre ! Peux-tu te présenter en quelques lignes ?

Pierre Bichet, graphiste WordPress BesançonJe m’appelle Pierre, j’ai 37 ans et depuis 2002 je suis graphiste le jour dans une petite agence de com’ de l’Est de la France (4 personnes… et un chat !).
Et la nuit, je rédige des articles de blog, anime une communauté d’utilisateurs du thème Divi et développe des plugins pour WordPress.
Entre temps, je fais l’idiot avec mes 2 filles ainsi que du bénévolat dans une association de mon village. Et quand il me reste quelques minutes, j’essaye de ressortir ma gratte qui prend la poussière depuis quelques années…

Cerné par deux filles ! Bien obligé de faire diversion pour pouvoir s’éclipser et retourner sur l’ordinateur pour travailler sur les projets WordPress 😀
Avant d’être papa, comment as-tu attrapé la fièvre du créatif numérique ?

Un peu comme tous ceux de ma génération, je pense… c’est-à-dire au milieu des années 90, grâce aux CD que nous recevions dans la boîte aux lettres familiale : « AOL vous offre 50 heures d’Internet gratuit ! »

Plus sérieusement, j’ai designé mon premier site web en 2003 ; c’était pour un fromage régional et à l’époque la tendance était aux interfaces de taille fixe. Il fallait tout faire rentrer dans un format du genre 800 x 400 px, à grand renfort d’ascenseurs dans une mise en page en tableaux, car les CSS n’étaient pas encore vraiment démocratisées…

C’est grâce à un prestataire auquel on sous-traitait le développement de nos sites que j’ai ensuite découvert WordPress ; mais je ne saurais pas donner une date précise. Je me souviens juste qu’entre les sites « taille fixe » et le premier site WordPress, il y a eu une longue période de sites statiques ou avec administration partielle via des CMS propriétaires lourdingues.

Et bien que je m’intéressais au développement depuis ma formation d’infographiste, je n’avais réalisé que deux ou trois sites persos en HTML/CSS en dilettante, ainsi que quelques AppleScripts dans le but d’optimiser mon workflow dans InDesign.

Je suivais néanmoins le thème Divi du coin de l’œil, intrigué par ce concept de constructeur de page qui limitait les incursions dans le code.
Mais ce ne fut réellement qu’à l’automne 2017 que mon âme de graphiste, séduite par le Visual Builder en front-end de Divi 3.0, me décida à concevoir des sites sous WordPress dans un cadre professionnel.

Depuis l’annonce de Divi 3.0 au début de l’été précédent, je me documentais goulûment sur le sujet, ce qui m’a permis de me créer une base de connaissance assez conséquente sur la « Divisphère ».

Divi c’est pour les artistes, ce n’est pas moi qui le dit…

Comment occupes-tu ton temps actuellement quand tu ne fais pas le clown pour faire rigoler tes filles ? (puisque t’es un heureux papa, ça sera le fil conducteur, d’accord ? 😀 )

Et bien, je ne demandais justement qu’à partager toutes ces connaissances accumulées sur l’écosystème Divi.

J’avais donc pour projet de créer un blog pour parler de Divi, mais celui-ci restait malheureusement au stade embryonnaire, faute de temps et de motivation…
Alors, quand Julien Guiard, que j’avais croisé sur le groupe Facebook Divi France, et qui venait de lancer son propre blog « « Divi-Community.fr » me proposa courant octobre 2017 de partager la tribune avec lui, je vis là l’opportunité idéale de m’exprimer sur ce sujet qui me passionne.
Avec Julien, on a tout de suite accroché et je pense qu’on est vraiment sur la même longueur d’onde : on est complémentaires et on a la même vision des choses. Et comme dit l’adage : « si seul on va vite, à deux on va loin ! »

Rapidement, Divi Community trouva donc son public et, à l’heure où j’écris ces lignes, soit environ 8 mois après le lancement du site, nous avons déjà publié près de 50 articles et les statistiques de fréquentation nous surprennent un peu plus chaque mois.

De plus, Divi Community mérite de plus en plus son nom car une vraie communauté francophone a vu le jour.
Enfin, nous avons énormément de projets pour le futur et nous ne doutons pas que le meilleur reste à venir…

En parallèle, je passe également beaucoup de temps à travailler sur des plugins pour WordPress, généralement en relation directe avec Divi. Je conçois des outils qui, avant tout, me facilitent la vie et que je commercialise ensuite ; à l’instar de Divi Visual Footer » par exemple, qui permet de combler un manque de Divi en nous autorisant à créer comme on l’entend le footer de notre site directement dans le Visual Builder.
Je bouillonne d’idées pour améliorer Divi, mais pas je dois constamment composer avec la recherche de temps libre et l’acquisition des connaissances nécessaires à mes travaux.

En effet, le temps est une denrée rare pour les professionnels du numérique, et je pense que cela est encore (beaucoup) plus vrai lorsqu’on a des enfants 😉 😉 WordPress a donc pas mal d’importance dans ton quotidien…

Du coup, le graphiste se met au développement de plugins WordPress/Divi !? Tu dois vraiment être tombé amoureux de Divi à un point considérable. Et c’est devenu ton cœur de métier principal ?

Oui et non… ces dernières années, à l’agence, je consacre clairement de plus en plus de temps à WordPress, en raison de l’augmentation de la part de projets numériques face aux projets print.

Néanmoins, « Paper is not dead » ! Donc je passe mon temps à switcher entre mon logiciel de mise en page et mon éditeur de code. Gymnastique délicate je le conçois, mais dans une petite structure, pas d’autre choix que d’être multi-taches…

Perso, mes études d’infographie ont confirmé que ce que je voulais faire, c’était le Web, en particulier à cause de la lourdeur d’un soft tel qu’InDesign comparé à un IDE comme, je ne sais pas moi… à l’époque : NotePad++, ce genre de tool qui ne plante jamais 🙂

Je suis sûr qu’une forte expérience en print sert également pour le Web.

Peut-on dire de toi que tu es un expert Web/WordPress aujourd’hui ?

Jamais je n’aurai la prétention de me qualifier d’expert en quoi que ce soit ! Quoi que l’on fasse, il faut constamment garder à l’esprit qu’il y aura toujours quelqu’un de meilleur au-dessus de soit. Mais, je pense qu’il est tout de même important d’entretenir l’ambition de chercher à prendre sa place…

Comme je me plais souvent à le dire, je me vois surtout comme un « résolveur de problème », quel que soit le domaine d’activité concerné. En fonction du souci que je rencontre, je fais les recherches adéquates, y consacre le temps nécessaire et fais tout pour passer outre.
D’ailleurs, les quelques plugins WordPress que j’ai développés jusqu’à aujourd’hui sont les fruits de ces problèmes résolus.

Pourquoi WordPress et pas un autre CMS ?

Comme je l’ai dit plus haut, j’ai eu à faire à pas mal d’autres solutions de gestion de sites. Mais, quelques soient mes incursions dans d’autres systèmes, je revenais toujours à WordPress.
Partant du principe qu’il ne faut pas se disperser pour maitriser, c’est tout naturellement que je finalement arrêté mon choix sur WordPress et Divi.

Parmi les CMS, c’est clairement WordPress qui est promis au plus bel avenir.
Et dans la flopée de constructeurs de pages, même si Elementor s’est vite et bien fait sa place, je mise encore et toujours sur Divi. Alors oui, on peut reprocher à l’équipe d’Elegant Themes de parfois faire l’autruche pour certaines corrections de bugs ou ajouts de fonctionnalités pourtant essentielles, on peut aussi penser qu’ils s’appuient un peu trop sur la communauté, mais je suis convaincu que c’est ce qui créé l’émulsion et la richesse de l’écosystème Divi.

Je suis pareil que toi : me spécialiser à 100% sur un seul thème WordPress est le meilleur choix que j’ai jamais fait pour ma productivité et la qualité de mes réalisations.
La réalisation qui t’as donné la plus grande fierté avec WordPress c’était quoi ?

Je pense que ma plus grande fierté est mon plugin Caldera Forms Style Customizer for Divi & Extra : un add-on pour Caldera Forms qui permet de styler ses formulaires via le personnaliseur de thème de WordPress.

Déjà, il faut savoir que j’ai une « légère addiction » aux formulaires… allez savoir pourquoi mais j’adore ça ! Quand j’ai découvert Caldera Forms, j’ai eu un énorme coup de cœur pour ce plugin qui embarque un constructeur de formulaires et moult options dans sa version gratuite. Pour moi, il se marie très bien avec Divi car il partage le même état d’esprit.
Je regrettais juste le style graphique un peu trop commun des formulaires. Après avoir lu quelques articles expliquant comment styler ses formulaires pour les faire correspondre au style par défaut de Divi, je décidai donc de pousser un peu plus loin la personnalisation… ce qui a finalement débouché sur un plugin.
À peine avais-je annoncé la sortie prochaine de l’extension que j’ai été contacté par l’équipe de CalderaWP (qui édite Caldera Forms) et quelques semaines plus tard, l’add-on était en vente sur leur site.

Actuellement, je travaille sur la version universelle du plugin qui sera compatible avec tous les thèmes WordPress et qui embarquera des dizaines d’options supplémentaires.

Je ne connaissais pas Caldera, c’est fou ça… ! Le monde est petit, sauf avec WordPress. 🙂 Bravo pour ce partenariat !

Si tu devais donner un seul conseil aux débutants WordPress ?

Entreprenez et donnez-vous les moyens de réussir.
Oubliez l’excuse du « j’ai pas le temps » : une journée fait 24h, occupez-les intelligemment !

On oublie notre fil conducteur ! 😀 Petite question à Pierre, le père : que dirais-tu si tes filles te disaient qu’elles veulent faire le même métier que son papa plus tard et quel conseil leur donnerais-tu ? 🙂

Je ne saurais que les encourager à continuer sur cette voie. Non pas pour créer une dynastie familiale dans le but de devenir les « Ewing’s de WordPress » mais parce que le développement (en général) est clairement un métier d’avenir. Ou tout du moins qui a de l’avenir face à ceux menacés de disparition…

Bien que ma femme et moi soyons tous les 2 graphistes et que nous passons chacun a minima 8 heures par jour devant notre Mac :

Nous avons une politique de « temps d’écrans » très stricte pour nos filles.

C’est vrai que ça peut paraître surprenant – surtout que je repense à mon enfance et tous les mercredis passés devant le Club Dorothée puis sur ma Megadrive ! – mais aujourd’hui, nous connaissons mieux les effets qu’une surexposition aux écrans peut avoir sur le développement des enfants et je crois réellement qu’il ne faut pas sous-estimer son impact.
De plus, notre ainée commençant à peine à lire, je vais quand même attendre un petit peu avant de lui apprendre les bases du HTML !

Pour continuer sur le thème de l’enseignement, il faut savoir que je suis un fervent partisan de la formation en alternance. Après des années de scolarité où j’ai eu l’impression de perdre mon temps sans vraiment savoir où j’allais et à quoi me servirait les connaissances qu’on tentait de m’inculquer, c’est pendant les mois passées en entreprise durant ma formation de graphiste que j’ai vraiment pris du plaisir à apprendre, car j’étais enfin sur des cas concrets, confronté à de véritables problématiques professionnelles.

J’ai le souvenir, ado, que ceux qui s’orientaient vers de l’alternance étaient bien souvent moqués : « haha, il est trop nul, il va faire un CAP boucherie-charcuterie ou boulangerie-pâtisserie ! ». Et bien, ces types-là doivent bien rire aujourd’hui car ils sont certainement à la tête de 2 ou 3 boutiques et roulent très probablement en Porsche…

Quelle que soit la direction que prendra la vie professionnelle de mes filles, je serai toujours à leurs côtés pour les épauler ;

L’important est que mes filles s’épanouissent dans leur métier car il n’y a pas de plus grand bonheur que de gagner sa vie avec sa passion.

La télévision, Internet, les smartphones, ce sont de véritables fléaux pour le développement psychologique et intellectuel des enfants d’aujourd’hui. Pour ceux qui ignoreraient cela, je les encourage par exemple à visionner le reportage « Accros aux écrans (Envoyé Spécial) ».

Bill Gates, Steve Jobs ou Mark Zukerberg eux-même interdisent les écrans à leurs enfants, cela n’est pas pour rien !

Cela doit être difficile de faire respecter une politique de temps d’écran quand on est soit même un grand utilisateur, non ?

Au final, mes filles ne me voient pas tant que ça devant un écran, car à la maison je bosse surtout le soir quand elles sont couchées.

Après, il reste le smartphone où il faut faire plus attention. Mais quand ton tél fait bip-bip et que ta fille te dit « t’as un message, tu regarderas pas ? » ; il est bon de lui expliquer que ça peut attendre et qu’on n’est pas obligé de dégainer à la moindre notif ’ 😉

Merci pour ta participation. Où peut-on te suivre pour la suite ?

Merci pour cette tranche de vie 🙂